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Et mourir en hiver.

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Pour un regard un peu trop rebelle...

Elle est perdue, elle le sait. Une de ces jours, elle finira par mourir, c'est forcé, elle est née pour ça, pour faire semblant de vivre, et puis pour s"endormir à jamais, juste comme ça. Elle le savait, et pourtant elle n'a pas changé d'avis.

Elle mourra ici, parmi ces gens avec qui elle vit mais qu'elle ne connait pas, assise sur cette colline, le regard tourné toujours vers ce même horizon qui ne change jamais.
Elle mourra parce qu'elle n'avait pas de coeur, pas d'âme, juste une enveloppe pour sourire et détruire.
Elle ne savait pas avoir pitié de ceux qui voyaient leurs frères mourir, elle ne pouvait pas les consoler parce-qu'elle n'éprouvait aucune tristesse, aucune tendresse, devant ces gens désemparés, elle continuait à sourire bêtement, on l'avait programmée comme ça.
Elle les regardait, mais elle ne les voyait pas vraiment, pour elle, c'était juste des statues posées devant elle pour lui barrer la route, juste des arbres le long du chemin, juste des pions sur un échiquier.

Quand tu tires, vises toujours le coeur, jamais la tête, c'est bien trop petit, et comme ça si tu rates, tu toucheras une autre partie de la cible...

Quand ils lui parlaient, elle n'écoutait pas, elle les coupait simplement pour répondre toujours ces mêmes quelques mots, les mots qui font mal, sans les penser vraiment, juste pour qu'ils se taisent.
Un jour, ils avaient fini par venir la chercher, parce-qu'elle ne leur servait à rien, où plutôt, ils étaient venus avec l'intention de la tuer, mais finalement, ils l'avaient gardée, juste parce-que malgré sa petite taille, elle les fixait avec fierté et mépris, juste parce-que brillait au fond de ses yeux celle même lueur froide que dans le regard de tous les assassins.

Et puis elle les a suivis, sans résister, parce-qu'au fond ça l'arrangeait qu'on lui trouve une utilité. Alors elle a pris la voie qu'ils avaient choisi pur elle, c'était ça ou mourir, elle a préféré ça, parce-que ça lui donnait un objectif, une raison de rester elle, et puis aussi pour ne pas se sentir lâche.
Elle n'aimait pas spécialement ce qu'ils lui faisait faire, mais elle ne détestait pas non plus, et puis elle le faisait par habitude, parce-que c'était son travail, rien d'autre, et elle ne savait faire que ça.
Elle faisait simplement ce qu'on lui demandait, même si parfois elle trouvait ça un peu injuste, elle ne se posait pas de questions, elle exécutait les ordres, on l'avait élevée comme ça.

... Quand tu tires, c'est toujours deux coups, le premier pour tuer, le deuxième pour ta sécurité, mais jamais, jamais dse troisième chance, c'est une perte de temps et c'est ce que causerais ta fin...

Elle a grandi, un peu, mais surtout, elle a appris, beaucoup. Sous ses airs naïfs et obéissants, elle mémorisait mathématiquement tout ce qu'elle voyait. Au fond, depuis le début, elle prépare son plan, elle nourris son véritable objectif avec les quelques sentiments qui lui restent.
Elle leur laissait juste croire qu'ils étaient les maîtres et elle la petite subordonnée aveugle devant leurs visages hideux.
Elle a fini par devenir l'une des leurs, elle faisait partie des meilleurs, même, parce-qu'elle possédait cet avantage d'avoir l'apparence d'un petit ange aux longues boucles brunes et aux yeux comme la nuit.
Mais elle n'en tirait aucune fierté, elle le faisait juste comme ça, ça faisait partie de sa vie, le reste, ça lui était égal.

... Tirer sur une cible ou tirer sur un homme, c'est là que se fait toute la différence. Il y aura toujours cette première et dernière éternité de doute, celle qui décidera de ton avenir. Si tu réussis, tu vis, tu tu rates, tu meurs...

Mais combien de fois a-t-elle vu ces femmes aux visages ravagés de larmes, agenouillées, leur enfant dans les bras.
Combien de fois l'ont t-ils regardée comme un monstre, avec cette incompréhension muette et cette douleur naissante à laquelle ils n'arrivent pas encore à croire?
Combien de fois avan que ces statues en pleurs ne se retrouvent elle aussi avec la même tâche qui grandit à la place du coeur?
Combien de fois a-t-elle effleuré de ses douces mains souillées les joues de ces petits enfants arrachés à la vie alors qu'ils venaient à peine de la commencer, comme pour leur demander pardon?
Pardon de n'avoir pas pu choisir une autre victime, ce n'est pas elle qui décide, c'est la seule chose qui la dégoûte, voir mourir ces enfants, qui, eux, n'ont rien fait. Mais elle a toujours obéit, parce-que le moment n'était pas encore arrivé.
Ce sont toujous les enfants les premiers, comme ça, ils ne souffrent pas, ils n'ont pas le temps de voir ceux qu'ils aiment s'effondrer, pas le temps de comprendre, juste des étoiles dans leurs yeux, juste ce même sourire innocent qui colle à leurs lèvres parce-qu'il n'a pas eu le temps de s'en aller, juste du rouge qui grandit sur leur corps frêle.
Elle avait toujours trouvé ça injuste, que toutes ses cibles aient des yeux limpides, alors elle se depêchait de finir pour pouvoir les fermer enfin, pour ne plus qu'ils la regardent avec cette résignation douloureuse ou cette joie qui va s'éteindre sans prévenir, pour qu'elle ne les voit plus réciter des prières muettes avant que la boue froide ne devienne leur dernier manteau.

Aujourd'hui, elle sait qu'elle est perdue, que c'est sûrement la dernière fois que le revolver va déclamer sa sentence.
Elle voit le sourire hypocrite en face se faner comme les cendres du cigare écrasé avec tant de mépris sur un coin de la table.
Elle voit les bajoues tremblotantes et les faux-plis disgracieux qui pâlissent, et l'homme ventripotent en face qui comprend enfin qu'il a fait une erreur autrefois en épargnant une vie, parce-qu'aujourd'hui elle va venger toutes les autres en faisant voler en éclats la sienne.
Elle voit les doigts mesquins s'agiter sur le prétentieux noeud de cravate, et elle entend la voix mielleuse s'efforcer de mentir encore, de marchander son avenir.

Elle se sait perdue, parce-qu'elle les a tous tués, ceux qu'elle aimait et qu'elle faisait semblant de ne pas reconnaître, à coups de revolver, elle a explosé son coeur en même temps que les leurs.
Elle ne changera pas d'avis.
Depuis qu'elle n'avait de souvenirs auxquels se raccrocher, elle attendait ce moment.
C'est la seule fois où ça la fait presque sourire de tenir l'arme entre ces doigts, la première fois où ça la rend presque heureuse de tenir une vie entre ses mains.
La seule fois où c'est son coeur qui décide, le seule fois où sa haine transparait.
Elle venge toutes ces jeunes filles, tous ces enfants, tous ces bébés qu'elle a froidement tués, tous ces visages, connus ou non, qu'elle a gommés.

La balle crache enfin au visage de l'homme qui arrête de trembler sous ses airs supérieurs, elle vomis le fracas de ce flot de mots trop longtemps gardé prisonnier.
Elle voit les yeux se fixer, la bouche se tordre en un dernier rictus, et, sur le coeur qui tombe, une tâche de sang qui s'élargit.

Elle contemple, muette, le spectacle sanglant qui repose à ses pieds. C'était le dernier.
Elle lance au visage de l'homme à jamais immobile l'arme qu'autrefois il lui avait mise dans la main.
Avec un bruit mat, le revolver retombe sur le tapis à côté, deux gisants offerts à l'éternité.

Et puis elle tourne les talons, elle s'en va. Dehors, il y a le soleil qui continue de briller, le soleil qui peint sur le marbre des tombes un manteau doré pour veiller ces dormeurs du passé.

Dehors, elle retrouvera des gens, et puis elle vivra, jusqu'à ce que la mort vienne la chercher.
Elle vivra parce-qu'elle ne se donne pas le droit de partir, elle doit vivre pour tous les autres, tous ceux qui sont tombés face à elle, tous ceux qui ont reçu ses balles en plein coeur, tous ceux là qui sont morts à cause d'un regard un peu trop rebelle...

[Dark-ever]

Ecrit par Dark-ever, le Vendredi 4 Février 2005, 21:46 dans la rubrique "After Time".

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